vendredi 11 juillet 2014

Contraste

       Il y a quelques jours, ma consoeur 10lunes a publié un joli billet relatant une naissance pleine d’émotion. Une naissance accompagnée par une sage-femme qui a su se faire toute petite et mettre son confort en suspens. Juste pour permettre à cette mère d’accoucher comme elle en ressentait le besoin.  

     Mais en le lisant, je ne pouvais m’empêcher d’avoir en toile de fond cette conversation récente entre deux collègues. Contraste. 

     L'une d’entre elles ne parvient pas à comprendre les femmes qui, de nos jours, souhaitent encore accoucher à domicile.
  Dans son esprit, tout d’abord, les peurs habituelles des complications que nous avons toutes vécues lors de nos exercices hospitaliers.
      Et puis, forte de ses années d’expérience, elle peut l’affirmer : les accouchements sont de moins en moins médicalisés et les femmes de plus en plus écoutées. Bien qu’elle ne soutienne pas trop le principe des projets de naissance qui encombrent la tête des femmes et pourraient la limiter dans l’exercice de son art.
Enfin, elle comprend d’autant moins ces femmes que sa maternité bénéficie d’une « salle nature » dans laquelle elles peuvent accoucher plus physiologiquement.
     Bref, sa conclusion est sans équivoque : plus écoutées, moins soumises à la technique et dans une salle aménagée, les femmes  accouchent dans sa maternité vraiment comme si elles étaient chez elles.

      Soulignant tous les efforts consentis par l’équipe, sa collègue lui apporte un autre éclairage au gré de la conversation.
   Les pays qui ont fait le choix des maisons de naissances indépendantes et des accouchements à domicile mettent-ils vraiment leurs citoyennes en danger ? Ce n’est pas ce qu’affirment des études bien menées qui concluent même à de meilleurs résultats pour les femmes accouchant chez elles après un premier enfant.
     Pour la majorité des couples, les projets de naissance ne sont pas un programme préétabli qui détermine à l’avance le déroulement de l’accouchement. Pour beaucoup, il est juste l’assurance que le professionnel qui sera là le jour J pourra tenir compte de leurs particularités et agir dans le respect de leur sensibilité et de leurs idéaux car ils auront pu être transmis.
    Et bien que la première le soutienne mordicus, « comme à la maison » n’est pas « à la maison ». Ne serait-ce que parce qu’il faut quitter le foyer et faire un trajet pour se rendre dans un lieu où on n’est pas chez soi.
   Les femmes qui accouchent chez elles soulignent souvent la spontanéité dont elles peuvent faire preuve dans un espace qui est le leur et avec une sage-femme qu’elles connaissent. C’est elle qui est chez eux et non l’inverse. Aussi les femmes s’autorisent-elles bien plus facilement des positions ou des sons antalgiques parfois refreinés en structure.

    Au fil des minutes, la discussion se poursuit, les points de vue s’échangent et on en revient aux libertés de position.
    La première consoeur favorise la déambulation mais se montre en revanche très réticente face à l’accouchement sur un tabouret de naissance. Difficulté de contrôle de la progression du fœtus ? Problème d’ergonomie pour la sage-femme qui doit parfois se contorsionner ? Questionnements quant à la tension générée sur le périnée ? Non, rien de tout ça. La cause de cette réticence est tout autre et elle finira par la donner. Elle est dérangée par les accouchements sur le tabouret car…elle trouve ça sale.

    Comme à domicile ? Vraiment ?


Illustration : utilisation d'un tabouret d'accouchement 

Comme 10lunes, je termine en donnant un lien. Les sages-femmes françaises ont les plus grandes difficultés à se faire assurer pour les "accouchements à domicile pas comme en salle nature". Elles ont décidé de saisir la justice et ont besoin de soutien
Vous trouverez ici le communiqué de presse de l'Association Nationale des Sages-Femmes Libérales

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